Dans un intéressant arrêt de section n°409677 du 3 décembre 2018, le Conseil d’Etat est venu apporter quelques précisions importantes sur le déclenchement du délai de recours contentieux contre les actes règlementaires pris par les collectivités territoriales.
Dans cette affaire, somme toute assez singulière voire par certains aspects choquante, le Président du Conseil Général (pas encore Départemental) avait pris l’arrêté litigieux conditionnant son accueil des mineurs étrangers isolés (MEI) au titre de l’aide sociale à l’enfance(ASE) à une prise en charge sanitaire préalable dès lors que ces mineurs provenaient de pays exposés au virus Ebola ou présumés l’être.
La ligue des droits de l’homme avait introduit un recours en annulation contre cette décision qui avait été jugé tardif en appel, compte-tenu de la date d’affichage de l’arrêté à l’hôtel du département.
Ainsi, et quand bien même certains motifs d’annulation avaient de grande chance de prospérer contre cet acte, compte-tenu de son illégalité manifeste, les requérants se trouvaient forclos.
Devant le Conseil d’Etat, c’est une autre lecture de la procédure contentieuse qui est donnée et le praticien ne peut que s’en féliciter.
En effet, le Conseil d’Etat affirme au visa du CGCT et du CJA et plus précisément au regard d’une lecture combiné des articles L 3131-1 du CGCT et de l’article R 421-1 du CJA que le délai de recours contentieux contre un acte règlementaire ne commence à courir qu’à compter du moment où celui-ci a été régulièrement publié (au recueil des actes administratifs ou sur le site de la collectivité par voie dématérialisée et non pas seulement affiché.
Le seul affichage ne fait en effet pas courir le délai de recours contentieux contre un acte règlementaire.
C’est selon nous, le sens de l’article R 421-1 qui ne parle d’ailleurs que de « publication ».
Certaines questions demeurent toutefois en suspens :
La solution jurisprudentielle ici dégagée par le Conseil d’Etat s’applique-t-elle à toutes les collectivités locales ou bien seulement à celles d’une certaine taille comme les Conseil Départementaux ou Régionaux ?
En effet, l’affichage d’un acte règlementaire dans une petite c
ommune n’a pas le même impact -juridique- que dans une grande collectivité où l’on comprend aisément qu’une lecture littérale de l’article R 421-1 du CJA soit nécessaire afin de garantir aux citoyens l’exercice d’un recours juridictionnel effectif.
L'affichage d’un acte règlementaire devrait toutefois suffire à déclencher les délais de recours contentieux dans une petite commune (à la condition qu’ils soient bien mentionnés sur l’acte ce qui est également une condition imposée aux collectivités…).
Est-ce à dire également, principalement pour les collectivités d’une certaine taille, qu’un acte règlementaire puisse être exécutoire sans pour autant que les délais de recours contentieux soient déclenchés ?
Lien vers l’arrêt commenté :
http://arianeinternet.conseil-etat.fr/arianeinternet/getdoc.asp?id=214922&fonds=DCE&item=1